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Écrit par Laurent Guilmain

Vous avez dit « Chic et pas cher » ?

 

Le code de la santé publique dispose en son article R4127-215 que la profession dentaire ne doit pas être pratiquée comme un commerce.

Le texte ajoute que sont notamment interdits :

1° L'exercice de la profession dans un local auquel l'aménagement ou la signalisation donne une apparence commerciale ;

2° Toute installation dans un ensemble immobilier à caractère exclusivement commercial ;

3° Tous procédés directs ou indirects de publicité ;

4° Les manifestations spectaculaires touchant à l'art dentaire et n'ayant pas exclusivement un but scientifique ou éducatif.

Souvent sans même le vouloir ou le savoir, notamment à raison de démarchages de sociétés commercialisant des sites internet, des chirurgiens-dentistes se sont retrouvés poursuivis devant leurs pairs pour « publicité ».

Et jusqu’à récemment ils étaient souvent avertis ou blâmés.

Mais tout a changé le 23 octobre 2018.

En effet, interrogée par une chambre disciplinaire, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l’interdiction édictée par le code de la santé publique était générale et absolue et, consécutivement, incompatible avec la réglementation européenne. (Affaire C-296/18)

Sur la base de cette décision, le Conseil d’Etat, dans un arrêt du 6 novembre 2019, curieusement non publié au recueil, a fort logiquement donné raison à un chirurgien-dentiste qui avait demandé au ministre de la santé d’abroger le désuet article R4127-215 du Code de la Santé Publique.

Et plus récemment le Cabinet ANGLE DROIT AVOCATS a assisté devant la Chambre Disciplinaire de Première Instance des hauts de France un praticien accusé d’avoir fait de la publicité vantant l’ouverture de son cabinet.

La plainte a été rejetée et le praticien n’a eu aucune sanction.

Le raisonnement est logique : il n’existe plus de base légale car la disposition du Code de la Santé Publique est contraire aux règles communautaires, lesquelles priment.

 

Cela ne signifie pas pour autant que tout est permis, la Cour de justice ayant elle-même posé une limite d’importance : est illégale l’interdiction de tout recours à des procédés publicitaires de valorisation de leur personne ou de leur société sur leur site Internet.

Il n’est donc pas question d’envisager des publicités commerciales, l’art dentaire n’étant pas un commerce.

Dans l’attente d’une intervention du ministre de la santé, lequel est tenu de faire réécrire la disposition du Code de la Santé Publique, il est recommandé aux praticiens d’interroger leur ordre pour obtenir leur avis sur une communication.

Après tout une petite question vaut mieux qu’une poursuite ordinale, et en plus c’est…chic et pas cher.

 

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Laurent Guilmain
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